La section encore visible de la rivière Saint-Pierre qui traverse le terrain de golf de Meadowbrook sera bientôt détournée vers un système de canalisation de drainage souterrain, mais son histoire n’est pas terminée pour autant. Les amis du parc Meadowbrook et leurs supporters se sont battus avec acharnement pour la sauver et ils n’ont pas perdu l’espoir que la rivière soit à nouveau ouverte à la lumière du jour quand la situation le permettra.
À la suite d’un ordre de la Cour, le conseil d’agglomération de la ville de Montréal a accordé un contrat de 1,5 million de dollars pour effectuer les travaux, qui devaient commencer en novembre, après la fin de la saison de golf. Une fois terminé, ce projet diminuera le bassin versant de la rivière de 96 %.
Le projet implique également l’enlèvement d’un certain nombre d’arbres, et le contrat précise que 24 arbres et de nombreux arbustes doivent être plantés pour les remplacer. Nous craignons qu’une partie ou la totalité des arbres soient des arbres centenaires et que cela ait également un impact important sur l’environnement.
Les Amis, le Conseil régional de l’environnement de Montréal (CRE-Montréal) et le Mouvement Ceinture Verte ont récemment écrit une lettre conjointe au ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) pour demander que des mesures soient prises pour atténuer les dommages environnementaux causés par ces travaux. Nous avons demandé que la Ville de Montréal soit tenue de construire une structure de canalisation temporaire qui puisse être facilement enlevée pour permettre la remise en eau de la rivière une fois le problème de pollution résolu, et que la ville soit tenue de construire une installation pour capter l’eau de pluie et la canaliser de nouveau dans le lit de la rivière afin de soutenir la biodiversité locale. La réponse était décevante, le MELCC indiquant qu’il n’a pas les pouvoirs dans de tels cas puisque la juridiction en a été déléguée aux municipalités.
La rivière Saint-Pierre coulait autrefois des pentes du mont Royal, traversait Côte-Saint-Luc et se jetait dans un lac au pied de la falaise Saint-Jacques, pour se jeter dans le fleuve Saint-Laurent à Verdun. Au fur et à mesure de la construction des routes et des maisons de la ville, la rivière a été détournée sous terre dans le réseau d’égouts. La seule grande étendue d’eau qui reste à ciel ouvert est ce ruisseau, qui coule du collecteur d’égout pluvial Toe Blake d’un côté du terrain de golf et retourne dans un égout de l’autre côté. Les tuyaux d’égout mal fixés de certains immeubles et maisons de Montréal-Ouest et de Côte-Saint-Luc ont permis aux eaux usées et aux eaux d’égout brutes de s’infiltrer dans le réseau d’égout pluvial, polluant ainsi le ruisseau pendant de nombreuses années.
La société propriétaire du terrain, Groupe Pacific, a porté l’affaire devant les tribunaux. En janvier 2021, la Cour d’appel du Québec a ordonné à la Ville de Montréal d’empêcher toute eau, polluée ou non, d’être déversée sur le terrain de golf. Les représentants de la ville disent qu’ils ont les mains liées par la décision et qu’ils risquent d’être accusés d’outrage au tribunal s’ils ne la respectent pas.
Lors d’une réunion publique virtuelle à la mi-août, directrice du Service de l’eau de la ville de Montréal, Chantal Morissette, a expliqué que l’entrepreneur creusera à travers le terrain de golf, le long d’une servitude existante et installera une conduite souterraine, allant du collecteur Toe Blake jusqu’à l’autre côté de la propriété.
Un certain nombre de groupes et d’individus ont tenté de trouver un moyen d’empêcher cette issue. Les Amis ont lancé une campagne pour écrire au maire de Montréal à ce sujet, et 125 personnes, dont huit groupes environnementaux, ont jusqu’à présent signé une déclaration se faisant les gardiens de la rivière et de ses droits dans le cadre du groupe 200 mètres. Le CRE-Montréal a récemment publié un article dans le Bulletin Envîle Express en ligne. Soutenant que le plan n’a aucun sens, l’article souligne que la source de la pollution est connue et que des travaux sont en cours pour résoudre le problème. L’article ajoute que « la Cour d’appel n’a pas démenti que le ruisseau est un cours d’eau au sens de la Loi, un fait qui avait été établi précédemment par la Cour supérieure », et il suggère que la solution ordonnée par le tribunal entraîne des conséquences environnementales plus graves pour ce cours d’eau que le problème initial.
Les cours d’eau et les rivières augmentent la capacité des espaces verts à évacuer les eaux de ruissellement, notamment lors d’orages intenses ou en période de dégel, réduisant ainsi les risques d’inondation, et ils contribuent à rafraîchir la chaleur estivale. Ils constituent également des habitats importants pour de nombreuses espèces de plantes, d’oiseaux, d’animaux aquatiques et de micro-organismes, et leur présence contribue à la richesse de la biodiversité.
Au cours de l’été, la bibliothèque publique Eleanor London Côte-Saint-Luc a présenté une conférence sur le rôle important de la rivière dans l’histoire de Montréal. Un enregistrement de cette présentation est disponible sur la chaîne YouTube de la bibliothèque.
À faire de Meadowbrook un parc naturel du patrimoine urbain accessible à tous, il faut maintenant ajouter un autre souhait : que la rivière Saint-Pierre coule à nouveau sur Meadowbrook, libre de toute pollution, lorsque la situation le permettra.
Merci :
Les amis du parc Meadowbrook tient à remercier la Fondation Rivières, le GRAME, CRE-Montréal, le Mouvement ceinture verte, la World Wildlife Federation, Les amis du parc Angrignon, Sierra Club et le chercheur en histoire urbaine Justin Bur pour leur appui dans cette campagne.
Merci aussi aux villes de Côte-Saint-Luc et de Montréal, pour leur transparence.