Par Louise Legault
Il y a longtemps que je voulais retracer le passage de la rivière Saint-Pierre dans le Montréal d’aujourd’hui. J’ai saisi ma chance avec la rencontre de Virginie Destuynder de Hippo Vert l’Avenir.
Étudiante en hydrogéologie à l’École de technologie supérieure, Virginie a surimposé la carte des anciens cours d’eau, lignes de creux et bassins versants de l’île de Montréal de la professeure Valérie Mahaut, anciennement de l’Université de Montréal, à la grille des rues d’aujourd’hui. Grâce à la carte de Virginie, nous avons pu repérer de nombreux endroits où pouvait se manifester la rivière. Notre tournée nous a d’ailleurs offert quelques surprises fort agréables.
Un premier coup d’œil à la carte permet de noter plusieurs milieux humides qui participent à l’empreinte de la rivière (ils sont entourés d’un trait vert sur la carte). Ils sont d’ailleurs identifiés dans le règlement de contrôle intérimaire (RCI) adopté par la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) en 2023. Plusieurs de ces terrains sont la propriété du Canadien Pacifique et jouxtent la plus grande gare de triage dans l’Est du Canada.
La municipalité de Côte-Saint-Luc est sans conteste la ville de la rivière Saint-Pierre. Côte-Saint-Luc est d’ailleurs un membre honorifique de 200 mètres – Gardiens de la rivière Saint-Pierre et de ses droits pour sa participation à la campagne pour sauver le dernier tronçon visible de la rivière sur le terrain de golf Meadowbrook. Pas moins de dix endroits visités lors de cette première tournée se trouvent à Côte-Saint-Luc.
Parmi les surprises, nous avons par exemple découvert le parc Nathan-Shuster (1), tout en haut du boulevard Cavendish, un charmant boisé comprenant des sentiers aménagés et une passerelle sur un milieu humide. Devinez de quel cours d’eau il s’agit ? Côte-Saint-Luc a aussi su conserver deux autres boisés, le premier au parc Pierre-Elliott Trudeau avec sentiers aménagés (la rivière Saint-Pierre se manifesterait à proximité dans une zone humide clôturée [2] le long de la gare de triage du Canadien Pacifique). Le second boisé, la forêt Ashkelon (3), se situe sur les terrains de l’Hôtel de Ville sur le boulevard Cavendish, un milieu humide identifié par le RCI. Il n’y a d’ailleurs pas meilleur remède par temps de canicule que de se retrouver à l’ombre de ces grands arbres.
On notera aussi à Côte-Saint-Luc les terrains de soccer du Centre communautaire et aquatique (4) sur le chemin Mackle et le parc Allan J. Levine (6). Doit-on y voir des géomorphes, étant donné leur forme longiligne ? On entend par géomorphe un élément du paysage qui retient la forme d’un élément géographique, malgré l’absence de ce dernier. Le parc Allan J. Levine, par exemple, s’étire entre les avenues Wentworth et Blossom en enfilant l’un après l’autre les terrains de sport.
Selon la carte, le terrain de golf Meadowbrook reçoit pour sa part trois tributaires de la rivière Saint-Pierre : celui dans l’axe du chemin Guelph (7), celui qui traverse le chemin de la Côte-Saint-Luc (8) et celui qui traverse carrément le terrain en un long méandre. Le tributaire du chemin de la Côte-Saint-Luc reprend vie chaque printemps et inonde les prairies humides voisines, une partie du terrain de golf et forme en plus un étang temporaire à l’entrée du terrain de golf (9). Un petit pont aurait pu signaler l’endroit où il traverse le chemin de la Cöte-Saint-Luc, mais l’on a préféré une buse, moins pittoresque.
Petit salut en passant au parc Toe Blake (10), un autre géomorphe, dont la forme triangulaire témoigne de la présence passée de la rivière.
Les amis du parc Meadowbrook aurait bien aimé voir ajouter à la liste des milieux humides de la CMM l’étang temporaire du chemin de la Côte-Saint-Luc (9), de même qu’un étang permanent au bout du chemin Mackle (5). Surprise : c’est plutôt un milieu humide à la pointe sud de Meadowbrook (12), de l’autre côté de la voie ferrée, qui a été retenu.
Notre tournée ne serait pas complète sans une mention du Centre commercial Côte-Saint-Luc sur le chemin de la Côte-Saint-Luc (13). Dans le document Un pont vers 2040 Imaginer ensemble l’avenir de Côte-Saint-Luc Guide du processus de révision du plan d’urbanisme publié par la Ville de Côte-Saint-Luc en 2022, on soulignait justement la présence d’un terrain resté à l’état naturel entre les deux voies ferrées à l’arrière du centre commercial : était-ce là que l’on se baignait dans les années 1950 ? Des personnes nous ont aussi raconté se souvenir de la présence de la rivière au parc Hampstead (14) qui apparait aussi sur notre carte.
À bien y penser, il y avait là de quoi créer un système de gestion naturelle des eaux de pluie qui aurait pu absorber le trop-plein lors de fortes pluies – de plus en plus fréquentes avec les changements climatiques – et ainsi soulager le système d’égouts montréalais qui peine à suffire à la tâche. Avec le détournement de la rivière Saint-Pierre sur Meadowbrook cependant, le système n’aurait plus tout à fait sa raison d’être.
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